lundi 17 mars 2014

Profession vacataire

C'est ce que je suis au quotidien: médiatrice culturelle vacataire. Je suis donc payée à l'heure et, logiquement, plus je travaille, plus j'ai de salaire. Certains me diront que c'est le statut rêvé, que je peux partir en vacances quand je veux, mais c'est loin d'être la panacée (hé oui, quand vous partez, vous n'êtes pas payés). Oui, j'ai une certaine liberté, c'est vrai, je peux dire non à une visite si je ne suis pas disponible, mais bien souvent (sauf rendez-vous médical pris depuis un moment), je n'en ai pas le luxe parce que, une visite en moins, ce sont deux heures payées en moins et que ça compte sur un mois.

Dans mon malheur j'ai de la chance, je travaille dans un super environnement et dans une équipe géniale. Il n'empêche que, même si nous commençons à être reconnus par le reste du personnel du musée (on a même été invités au repas de fin d'année l'année dernière pour la première fois), nous n'avons aucun des avantages qu'ils ont. Pas de formation incendie, ni au maniement de l'ascenseur à personnes à mobilité réduite (que j'ai dû apprendre à manier dans l'urgence et dans la douleur), ni formation autre qu'en interne (peu ou pas payées), ni même reconnaissance au niveau du service (nous ne sommes pas compris dans le comptage du personnel, par exemple), ni mutuelle ou autres avantages. Et pourtant, tout le monde nous connaît, certains d'entre nous font aussi du gardiennage en extra (dont moi) et nous sommes bien intégrés mais, administrativement, nous sommes transparents.

On est soumis à la baisse de fréquentation de l'hiver (même si on parvient cette année à limiter les dégâts à peu près parce que la fréquentation a pas mal augmenté) et à celle des petites vacances scolaires (même si on fait quelques centres aérés). Il peut donc se passer une semaine parfois sans qu'on aille au musée. Du coup, ça nous laisse le temps de faire nos préparations de visite à la maison (non payées aussi, tout comme la demi heure avant chaque visite scolaire ou centre aéré où on prépare le matériel et les livrets). Mais fort heureusement, la patronne (une personne géniale) ne fait aucune différence et nous considère comme des personnes aussi qualifiées que ceux qui ne sont pas vacataires. Car il y en a deux au service qui sont recrutées à temps plein et qui gèrent l'administratif, les plannings, le matériel ainsi que la création de visite. L'un d'elle fut vacataire longtemps, donc elle comprend ce qu'on vit au quotidien et c'est très réconfortant. Elle cherche à nous arranger le plus possible (en remplissant nos journées, par exemple, car c'est plus pratique de venir pour deux visites que pour une pour celles qui viennent de loin) et est très à l'écoute, tout comme notre chef de service pour qui nous irions sans hésiter dans le feu. Pour ma part, je n'oublierai jamais qu'elle m'a fait confiance pour enfin rentrer dans le milieu dont je rêvais et je sais ce que je lui dois (ainsi qu'à l'animatrice du patrimoine de la ville qui lui a transmis mon CV, je sais aussi ce que je lui dois à elle).

Je n'ai pas 36 solutions pour sortir de ce statut: il faut avoir un concours et ensuite chercher un poste. Mais les concours culturels sont difficiles et je viens de me rétamer sur celui d'assistant qualifié de conservation (8/20 à l'écrit à la note de synthèse, ça fait mal, alors que j'avais réussi celle du concours d'attaché de conservation, plus difficile, allez comprendre. Mais pour 9 postes, il faut écrémer). Du coup pas le choix, je vais devoir attendre 2015 pour repasser attaché et assistant de conservation. Ah, et puis pourquoi pas le concours d'agent du patrimoine (bon, c'est gardien, mais pas trop le choix non plus) ? Je n'ai pas le choix, je désire vraiment à présent après des années de galère avoir un vrai poste qui puisse me permettre de vivre et non plus de vivoter, sans parler de faire des projets.

Niveau salaire ? Pas trop la joie (en ce moment entre 200 et 300 euros de salaire...et c'est beaucoup pour l'intersaison, je peux monter à 400-500 l'été si je travaille bien), je dois malheureusement compter sur les aides de la CAF pour m'en sortir (hé oui, je suis assistée mais c'est ça ou je ne peux ni vivre ni payer mon loyer, il y a des moments où il faut ravaler sa fierté, même si ça vous fait mal au ventre). Pourtant, je suis fière de mon travail et je n'en démordrai jamais: les gens comme moi sont socialement utiles. Je suis capable de faire des visites à tous types de public, du scolaire de maternelle à la personne handicapée mentale, moteur et visuel. Nous tous sommes compétents dans notre métier, nous avons fait des études (niveau moyen du service : bac + 5) et, tout ce qui nous sépare des gens qui ont un poste stable, c'est un concours. Nous sommes reconnus par nos collègues (y compris le directeur), par nos pairs, par notre chef de service, un peu de reconnaissance de l'administration ce serait trop demander ?